Nous venons obtenir une bourse ministérielle fléchée, via la coopération internationale du ministère (allocation cotutelle), nous cherchons de toute urgence (avant la fin du mois d’Avril) un(e) étudiant(e) de M2 qui serait intéressé(e) pour faire une thèse en co-tutelle dans le cadre de la collaboration Franco Chilienne (LIA) sur les flux géniques et l’adaptation en limite d’aire de répartition des grandes algues brunes.
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Intitulé du sujet de thèse : Flux géniques et sélection en populations marginales: un exemple dans le domaine marinChristophe Destombe, Professeur
mèl :
destombe@sb-roscoff.frBiologie Evolutive et Diversité Marine, Roscoff UMR 7144, Laboratoire International Associé Franco-Chilien Diams, Station Biologique de Roscoff, France. Tel. 02 98 29 23 20
Sylvain Faugeron, Professeur Assistant
mèl :
sfaugeron@bio.puc.clCASEB, Laboratoire International Associé Franco-Chilien Diams, Pontificia Universidad Católica de Chile, Santiago, Chili.
Ce sujet bénéficie d’une bourse de thèse fléchée au titre de la coopération internationale du ministère. Merci de prendre contact le plus rapidement possible avec les directeurs de thèse destombe@sb-roscoff.fr et/ou sfaugeron@bio.puc.cl date limite de candidature : le 28 avril 2009
Résumé :
Une des conséquences possibles du changement global est la modification de la répartition spatiale des espèces. D’un point de vue évolutif, ce changement correspond à un échec de l’adaptation dans les limites d’aires de distribution qui pourrait être dû soit à un manque de variabilité génétique suite à un bottleneck, soit aux effets antagonistes des flux géniques empêchant les possibilités d’adaptation locale.
Cette étude vise à mieux comprendre les limites évolutives et écologiques de l’adaptation des espèces dans le contexte des changements environnementaux par une approche de génétique des populations et de génomique environnementale. L’objectif est d’appréhender les facteurs susceptibles de modifier l’aire de distribution chez deux espèces d’algues brunes (Lessonia nigrescens située au Chili et Laminaria digitata en Europe). Plus particulièrement, nous testerons (1) l’hypothèse selon laquelle la faible taille efficace des populations marginales (par exemple situées en limite d’aire de distribution) favorise la dérive génétique rendant ainsi la sélection naturelle inefficace ; (2) l’hypothèse selon laquelle les espèces dispersent plus qu’elles ne s’adaptent aux changements environnementaux (arrivée massive de gènes non optimaux provenant des populations centrales). Ces différentes hypothèses seront testées par des outils de génétique des populations utilisant des marqueurs neutres (microsatellites et AFLP) et sous sélection (gènes candidats, EST). On s’intéressera à comparer populations marginales et centrales dans différentes régions de l’aire de distribution afin de s’affranchir de l’effet géographique. Ce projet de thèse Franco Chilien en cotutelle s’inscrit d’une part dans le cadre de l’ANR Ecokelp qui vise à caractériser en termes de biodiversité l’importance écologique, sociale et économique de ces forets d’algues et d’autre part dans le cadre d’un projet FONDECYT n°1090742 sur les facteurs affectant la dispersion chez ces espèces.
Abstract:
One of the consequences of global change is the modification of the spatial distribution of species. From an evolutionary point of view, this change corresponds to unsuccessful adaptation to ecological conditions in the limits of the species’ distribution area, either due to a lack of genetic variability due to bottleneck(s), or to the antagonistic effects of gene flow limiting local adaptation.
This PhD thesis will focus on understanding the evolutionary limits of adaptation in the context of global change, based on a population genetics and environmental genomics approach. The objective is to study the factors that modify the distribution of two kelp species (one located along the Chilean coast, Lessonia nigrescens, and the other in Europe, Laminaria digitata). More specifically, we will test (1) the hypothesis suggesting that small effective size of marginal populations (i.e. located in range limit) increase genetic drift preventing natural selection and (2) the hypothesis suggesting that species disperse more easily than they are able to adapt to environmental changes (high gene flow of non-adapted genes from central population). These different hypotheses will be tested using population genetics tools with neutral markers (microsatellites, AFLP) and markers under selection (candidate genes, EST). Marginal and central population will be compared in different geographical regions of the distribution range to avoid geographical effects. This Chilean French PhD project fits perfectly with the ANR Ecokelp project which aims to study the ecological, social and economic importance of kelps forest, as biodiversity aspect and with the project FONDECYT n°1090742 concerning environmental factors affecting the dispersal to these kelp species.
Descriptif du sujet:
Comprendre le rôle joué par la variation environnementale sur l’évolution de la biodiversité est une question fondamentale en biologie. Les populations situées en limite d’aire géographique ou en limite d’aire écologique d’une espèce sont exposées à de plus fortes fluctuations spatio-temporelles de l’environnement que les populations au centre d’aire et par conséquent sont susceptibles de présenter des patrons de sélection différents. Dans ce contexte, il a même été suggéré que la faible taille efficace des populations situées en limite d’aire, favorise la dérive génétique rendant ainsi la sélection naturelle inefficace (voir pour revue Ecker et al. 2008). Ainsi ces populations en limite d’aire seraient moins variables génétiquement et plus différenciées entre elles que celles en centre d’aire (Alleaume-Benharira et al. 2006, Engel et al. 2004, Faugeron et al., 2004, Vucetich & Waite 2003). Inversement, on peut considérer, que les flux de gènes peuvent être une force contraignante empêchant l’adaptation locale des populations marginales. Ainsi des modèles alternatifs, suggèrent que la maladaptation en limite d’aire est due au fonctionnement en puits démographiques (Kirkpatrick & Barton 1997 ; Case & Taper 2000) : la reproduction locale ne suffirait plus à maintenir ces populations marginales alors que l’intensité de l’immigration empêcherait l’adaptation aux conditions environnementales extrêmes. Selon ces modèles, on s’attend donc à une diversité génétique élevée des populations marginales.
La majorité des études réalisées jusqu’à présent, pour tester ces différentes prédictions s’intéressent aux populations situées en limite nord de l’aire de répartition des espèces de la zone tempérée de l’hémisphère nord (Hampe et Petit 2005). Par conséquent, l’effet relatif de la marginalité des populations par rapport à la centralité est généralement confondu avec l’effet géographique (Eckert, et al. 2008). Afin de s’affranchir de cet effet, il est important de comparer les populations marginales et centrales dans différentes régions de l’aire de distribution géographique d’une espèce. C’est ce que nous nous proposons de faire dans ce sujet de thèse, en comparant les différentes populations marginales et centrales de l’espèce Lessonia nigrescens, grande algue brune dont la répartition est étroitement liée aux différentes zones d’upwelling distribuées le long de la côte chilienne. Les récents phénomènes d’extinction et recolonisation observés chez cette espèce, liés au changement climatique ou à l’exploitation minière, permettent d’étudier des zones de recolonisation récentes (marginales) et de les comparer aux populations centrales. Le même type d’approche sera réalisé chez l’espèce Laminaria digitata en Bretagne sud correspondant à la limite sud de son aire de répartition et où le maintien des populations dépend principalement de la fréquence des upwellings.
Le sujet de thèse propose dans un premier temps d’étudier les fluctuations spatio-temporelles de la structure génétique des populations marginales et centrales, situées au centre et en limite d’aire (le but est de comparer plusieurs situations de marginalité pour s’affranchir de l’effet géographique). L’étude de la diversité génétique ainsi que la différenciation génétique entre populations permettra d’estimer la taille efficace des différents types de populations ainsi que les flux géniques entre populations. L’approche génétique basée sur l’assignation de génotypes multilocus (e.g. Pritchard et al. 2000 ; Manel et al. 2005) permettra par ailleurs d’identifier des flux géniques et de déterminer leur orientation et leur source. Pour répondre à cet objectif, des marqueurs nucléaires fortement polymorphes (microsatellites et/ou AFLP) seront utilisés.
Le second objectif de la thèse visera à analyser l’effet de la sélection dans les populations marginales à l’aide des outils de la génomique environnementales. Il sera abordé á partir de marqueurs génomiques type AFLP, en appliquant des méthodes de détection de la sélection sur les marqueurs (voir revue de Beaumont 2005). Des gènes candidats seront également disponibles à partir de banques EST dont l’expression sera analysée par PCR quantitative). Ceci permettra en particulier de comparer l’expression de gènes liés à la tolérance à la température (un des principaux facteurs susceptibles d’expliquer la limite d’aire de répartition) entre les populations centrales et marginales.
Les deux modèles biologiques retenus sont des grandes algues brunes : Lessonia nigrescens présente le long des côtes chiliennes et Laminaria digitata présente le long des côtes européennes. Ces algues forment de véritables forêts qui dominent l’habitat rocheux intertidal des régions tempérées à froides. Ces deux espèces cibles ont été choisies pour leur importance écologique et économique et parce qu’elles sont facilement accessibles aux grandes marées. Elles sont à la base de la chaîne alimentaire, servent d’habitat et favorisent le recrutement pour de nombreux animaux marins. Elles représentent également une des principales ressources pour la production d’alginates utilisés dans l’industrie alimentaire et cosmétique. L. digitata rencontre la limite sud de son aire de distribution dans le sud de la Bretagne. L. nigrescens trouve sa limite de distribution dans une zone de transition biogéographique située aux alentours des 30°S. Chez ces deux espèces, les populations sont soumises à des effets upwelling important susceptibles de modifier leurs distributions.
Contexte de la demande :
Ce projet de thèse sera développé en cotutelle entre l’université Pontificale du Chili et la Station Biologique de Roscoff dans le cadre du laboratoire international associé franco-chilien : LIA DIAMS. Il s’intègre parfaitement dans les projets de l’ANR Ecokelp et du FONDECYT n°1090742. Le projet interdisciplinaire Ecokelp, labellisé par le pôle Mer et coordonné par la Station Biologique de Roscoff, vise à caractériser en termes de biodiversité, l’importance écologique, sociale et économique de ces forêts d’algues brunes. Il regroupe des chercheurs biologistes et socio-économistes venant de France, du Chili et du Portugal, ainsi que des industriels, le parc marin d’Iroise et une ONG. Le projet FONDECYT s’intéresse aux facteurs susceptibles d’affecter la dispersion des spores chez les grandes algues brunes en étudiant plus particulièrement l’effet des upwellings sur la dispersion et la distribution de Lessonia nigrescens.
Ce projet de thèse bénéficiera des outils de génétique des populations (microsatellites mis au point chez les deux espèces) et des résultats déjà obtenus sur la caractérisation génétique et démographique des populations de ces espèces. Ces données serviront à mieux comprendre le fonctionnement démographique des populations ainsi que la dispersion des spores en fonction de l’environnement. Les techniques génomiques (EST, puces à ADN), largement développées sur Laminaria, au sein de l’UMR 7139 dans le cadre du projet Ecokelp (collaboration avec Catherine Leblanc) serviront à la compréhension des bases de la variabilité génétique de l’expression de la tolérance au stress.
La forte dimension internationale du projet, stimulante scientifiquement, renforcera les perspectives d'insertion post-doctorales du doctorant. D’un point de vue technique et méthodologique, le projet se propose d’aborder une nouvelle thématique transversale à plusieurs champs disciplinaires (de l’écologie à la génomique) ce qui ajoutera l’atout d’un profil original de génomique des populations à l’étudiant dans sa recherche de contrats post-doctoraux et de postes de recherche.
Références
Alleaume-Benharira, M., I.R. Pen & O. Ronce (2006) Geographical patterns of adaptation within a species' range: interactions between drift and gene flow. J Evol Biol 19: 203-215,
Beaumont MA (2005) Adaptation and speciation: what can Fst tell us? Trends in Ecology & Evolution 20, 435-440.
Case, T.J. & M.L. Taper (2000) Interspecific competition, environmental gradients, gene flow, and the coevolution of species' borders. Am. Nat. 155:583-605.
Eckert, C. G., Samis K. E. & S. C. Lougheed (2008) Genetic variation across species’ geographical ranges: the central–marginal hypothesis and beyond. Molecular Ecology 17: 1170-1188.
Engel C.R., Destombe C. and Valero M. (2004). Consequence of haloid-diploid life history and intertidal rocky shore landscape on microgeographic genetic structure in the red seaweed Gracilaria gracilis. Heredity, 92, 289-298.
Faugeron S., E.A. Martinez, J.A. Correa, L. Cardenas. C. Destombe & M. Valero. 2004. Reduced genetic diversity and increased population of Gigartina skottsbergii (Rhodophyta, Gigartinales) in southern Chile. Journal of Phycology 40: 454-462.
Hampe, A. & R. J. Petit (2005) Conserving biodiversity under climate change: the rear edge matters. Ecology Letters 8: 461-467.
Kirkpatrick, M. & N.H. Barton (1997) Evolution of a species' range. Am. Nat. 150:1-23.
Manel S, Gaggiotti OE, Waples RS (2005) Assignment methods: matching biological questions with appropriate techniques. Trends in Ecology & Evolution 20, 136-142.
Pritchard, J.K., M. Stephens & P. Donnelly (2000) Inference of population structure using multilocus genotype data. Genetics 155:945-959.
Vucetich, J.A. & T.A. Waite (2003) Spatial patterns of demography and genetic processes across the species' range: Null hypotheses for landscape conservation genetics. Cons. Gen. 4:639-645.