Laboratoire d’accueil : UR INRA Comportement et Ecologie de la Faune Sauvage - CEFS et Centre de Recherches sur la Cognition animale - CRCA
Responsables du stage : Georges Gonzalez (gonzalez@toulouse.inra.fr) et Richard Bon (rbon@cict.fr)
Contexte: La ségrégation sexuelle se réfère au fait que les femelles et mâles adultes vivent en groupes distincts et souvent dans des habitats différents hors période d’accouplement. C’est un phénomène partagé par de nombreuses espèces de vertébrés, mais particulièrement étudié chez les ongulés (Ruckstuhl & Neuhaus 2005). La ségrégation des sexes est expliquée par des hypothèses soit écologiques soit comportementales s'appuyant sur des causes proximales ou ultimes. Les principales hypothèses écologiques avancent des différences sexuelles de stratégie de reproduction ou de sélection alimentaire alors que les hypothèses comportementales privilégient des préférences sociales et/ou des rythmes d'activité distincts. L'origine de ces divergences est souvent attribuée aux différences morpho-physiologiques entre les mâles et les femelles adultes. En raison d’une augmentation non-linéaire du rapport énergie/masse corporelle, les mâles plus grands que les femelles chez les espèces sexuellement dimorphiques s’alimenteraient sur des habitats moins riches du point de vue nutritionnel que les femelles (body size-sexual dimorphism hypothesis). Les femelles s’investissant seules dans l’élevage des jeunes, seraient plus sensibles aux risques de prédation et sélectionneraient les habitats pour leur sécurité (predation risk-reproductive strategy hypothesis). Pour les hypothèses à base comportementale, le dimorphisme de taille entre les sexes constitue le socle de l’hypothèse des budgets d’activité (activity budget hypothesis) : les femelles plus sélectives que les mâles consacreraient plus de temps à s’alimenter. Ceci conduirait à une perte de synchronisation des activités et donc à la fission des groupes. Enfin, l’hypothèse des préférences sociales (social affinities hypothesis) avance l’idée que le développement du dimorphisme comportemental des individus des deux sexes conduirait à des préférences/évitements précoces ayant des conséquences à long terme et expliquant la ségrégation sociale et spatiale. Bien sûr, la plupart de ces hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives.
Sujet du stage : La plupart des études ont été consacrées à des espèces présentant un fort dimorphisme sexuel. Peu de travaux concernent les espèces sociales sexuellement monomorphes (Ruckstuhl & Neuhaus 2009). Ce projet propose de tester les conséquences d’un faible dimorphisme sexuel sur la ségrégation chez un ongulé de montagne, l'isard (Rupicapra rupricapra).
Nombre des travaux concernent des populations sauvages et dans la plupart des cas, le contrôle des facteurs écologiques, démographiques, sociaux est impossible. La population d'isards du secteur de Cauterets au sein du parc National des Pyrénées est un modèle très intéressant à cet égard, puisque elle est non chassée et plus de la moitié de la population est marquée.
Dans ces conditions, compte tenu de l’absence de dimorphisme sexuel, deux prédictions peuvent être testées: hors reproduction, 1) il n'apparaît pas de ségrégation en termes d’habitat et 2) le sexe n'est pas un facteur déterminant dans la composition des groupes. En outre, le suivi longitudinal permettra de mesurer l’intensité de la ségrégation sexuelle ou de son absence au cours des saisons mais aussi inter-annuellement.
Méthodologie et techniques envisagées : Les données ayant déjà été recueillies durant de nombreuses années, la/le candidat(e) devra posséder de bonnes capacités dans la manipulation de gros fichiers sous Excel et Access, ainsi que dans l'utilisation de logiciels d'analyses de données notamment R et ses librairies d'analyses (multivariates, ecological and environmental data,…)
Les indices de ségrégation d’habitat, spatiale et sociale seront estimés par la méthode proposée par Conradt (1998) ou ses dérivés (Bonenfant et al. 2007).
Conditions de réalisation et financement : la/le stagiaire sera accueilli au CEFS sur le site de l’INRA d’Auzeville près de Toulouse pour une durée de 2 mois. Selon le cas, il pourra se prolonger et dans ces conditions donnera lieu à des gratifications de stage.
Références bibliographiques
Conradt L. 1998. Measuring the degree of sexual segregation in group-living animals. Journal of Animal Ecology, 67, 2: 217-226.
Ruckstuhl K & Neuhaus P. 2005. Sexual Segregation in Vertebrates. Ecology of the two sexes. Cambridge : Cambridge University Press.
Ruckstuhl K & Neuhaus P. 2009. Activity budgets and sociality in a monomorphic ungulate : the African oryx (Oryx gazella). Can. J. Zool. 87 : 165-174.