EVALUATION DE LA VALEUR AGRONOMIQUE ET ECOLOGIQUE DES PRAIRIES PERMANENTES : SYSTEME D'INFERENCE FLOUE POUR L'AIDE A LA DECISION
Laboratoire d’accueil : LAE - UMR INPL-INRA Agronomie et Environnement Nancy-Colmar Encadrement : Prof Sylvain PLANTUREUX (LAE) et Jean VILLERD, Ingénieur de recherche (LAE) Employeur : Institut National Polytechnique de Lorraine Lieu de travail : Vandoeuvre les Nancy (54) Type de contrat : CDD 12 mois, rémunération nette 1900€ par mois Début du contrat : entre le 1 nov 2011 et le 1er janvier 2012, selon disponibilité du candidat
CANDIDATURES : Envoi lettre de motivation + CV à sylvain.plantureux@ensaia.inpl-nancy.fr
Résumé de la mission L'objectif est de développer un outil d'évaluation de la valeur agronomique et écologique des prairies permanentes i) en analysant et en enrichissant les connaissances scientifiques sur les relations entre cette valeur les facteurs anthropiques (pratiques agricoles) et naturels (sol-climat-végétation), et ii) en contribuant à faire progresser une méthode relevant du domaine de l'intelligence artificielle (inférence floue). Le stage aura un objectif fondamental (en agroécologie et en sciences de l'information) et un objectif appliqué (à destination des gestionnaires agricoles et environnementaux, des chercheurs et des formateurs). La valorisation envisagée se traduira par une ou des publications scientifiques, et par l'implémentation du logiciel eFLORAsys développé par le laboratoire Agronomie et Environnement (http://eflorasys.inpl-nancy.fr)
Profil recherché Docteur en agronomie ou en écologie Une expérience ou des connaissances dans les domaines suivants seront appréciés mais ne constituent pas une obligation: prairies permanentes, diagnostic agronomique, diagnostic écologique, techniques d’intelligence artificielle
PROGRAMME DE RECHERCHE DETAILLE
EVALUATION DE LA VALEUR AGRONOMIQUE ET ECOLOGIQUE DES PRAIRIES PERMANENTES : SYSTEME D'INFERENCE FLOUE POUR L'AIDE A LA DECISION
1) Personnels impliqués dans le projet :
PLANTUREUX Sylvain, Professeur (agronome)
AMIAUD Bernard, Maitre de conférences (écologue)
VILLERD Jean, Ingénieur de Recherche (mathématicien)
2) Contexte et enjeux
La place et le rôle des prairies permanentes en France et en Lorraine
Les prairies permanentes représentent en France 28% des surfaces agricoles . En Lorraine, cette proportion est de 38% (60% dans le département des Vosges), avec 438.000 ha de prairie permanente sur le territoire lorrain. Au-delà de ce bilan quantitatif, il est désormais bien établi que les prairies sont au coeur d’enjeux économiques (réduction des coûts de production), environnementaux (préservation de la biodiversité, prévention des pollutions par les nitrates et pesticides, stockage de carbone) et sociaux (qualité des paysages, mode de production « naturel » de viande et de lait). Ce constat scientifique et technique est relayé par une volonté politique, qui s’est traduite par l’inflexion de la Politique Agricole Commune, et des dispositions du Grenelle de l’Environnement (en particulier la trame verte). L’Union Européenne a ainsi demandé à ses états membres de conserver leurs surfaces en prairie permanente, et le gouvernement français inscrit dans son plan de développement rural et hexagonal (PDRH 2007) un système d’aides financières aux agriculteurs en vue de préserver des prairies de qualité. La Région Lorraine met également en oeuvre une politique en faveur de ces prairies permanentes, notamment dans le cadre de soutiens financiers à des Mesures Agri-Environnementales. Malgré cela, force est de constater que la surface de prairies permanentes continue de diminuer, en Lorraine comme dans l’ensemble du territoire national, avec des conséquences négatives sur le plan environnemental.
Comment enrayer la régression des surfaces de prairie permanente ?
Plusieurs éléments expliquent cette régression des surfaces, en premier lieu le contexte économique plus favorable aux grandes cultures (céréales, oléagineux, …). Un deuxième élément réside dans le déficit de connaissances techniques et scientifiques pour gérer ces prairies, en visant une qualité écologique et agronomique de ces surfaces. La valeur de ces prairies est encore mal connue ou mal considérée des agriculteurs, qui leur préfèrent des productions fourragères plus productives (maïs fourrage) sans considérer le bilan global. La mise à disposition d’outils de diagnostic scientifiquement validés à destination des gestionnaires (agriculteurs, conseillers agricoles, chargés de mission au sein d’organisme de gestion d’espaces naturels) est un enjeu fort pour inverser cette tendance, et assurer un maintien durable des surfaces en prairie permanente. L’environnement économique et le cadre politique continueront à peser fortement sur l’évolution des surfaces en prairies, mais le présent stage postdoctoral s’inscrit dans la démarche de lever des verrous techniques qui pèsent également.
La contribution du laboratoire Agronomie et Environnement
Le laboratoire agronomie et environnement (LAE) est fortement impliqué dans la production de connaissances et d’outils pour une meilleure gestion agronomique et écologique des prairies permanentes. Fort d’une expérience de 30 ans dans ce domaine, le LAE est actuellement engagé dans plusieurs programmes de recherche et de R&D sur les sujets suivants :
- Programme européen MULTISWARD sur le rôle de la diversité des prairies dans les systèmes d’élevage de ruminants (S.Plantureux, responsable de la tâche sur les indicateurs agri-environnementaux)
- Programme DIVA2 du ministère en charge de l’Ecologie « Evaluation des Mesures Agri-Environnementales à obligation de résultat » sur les surfaces fourragères (S.Plantureux, coordonnateur du projet, B.Amiaud responsable de la tâche sur l’évaluation agri-écologique)
- Programme CASDAR « Typologie nationale des prairies permanentes » du ministère en charge de l’Agriculture (S.Plantureux, Responsable scientifique du programme) qui inclut les 4 départements lorrains
- Programme CASDAR2 « Identification et validation d’INDIcateurs pertinents relatifs aux pratiques
- agronomiques et aux infrastructures permettant d’évaluer la BIOdiversité dans les systèmes d’exploitation d’élevage et de polyculture-élevage.» du ministère en charge de l’Agriculture (B.Amiaud, Responsable scientifique du programme)
- Typologie des prairies du massif vosgien (PNR des Ballons des Vosges, Chambre d’Agriculture 88, 67, 68)
3) Le site web eFLORAsys, outil de recherche et de développement
eFLORAsys (http://eflorasys.inpl-nancy.fr) est un site web développé par le LAE pour mettre à disposition de la communauté scientifique et technique des informations utiles pour la connaissance, le diagnostic et la gestion des prairies permanentes. Il est en ligne depuis 2010 et disponible en version française et anglaise. eFLORAsys est gratuit, afin de permettre au plus grand nombre de l’utiliser. Le site est le fruit des programmes de recherche antérieurs du laboratoire, et de l’expertise de ses chercheurs. eFLORAsys gère des bases de données sur les caractéristiques écologiques et agronomiques des espèces prairiales (près de 3000 espèces renseignées), et sur des prairies permanentes (composition botanique, sol, climat, pratiques agricoles). C’est actuellement la seule base de données agro-écologique disponible sur internet en France. Près de 3000 relevés de prairies du grand-est sont présents dans la base de données. Le projet de typologie national des prairies (2008-2011) a retenu eFLORAsys pour la gestion de l’ensemble des informations sur les prairies. La vocation du site est notamment d’abriter à terme un inventaire national des prairies permanentes, à l’instar de l’inventaire national forestier qui existe depuis de nombreuses années. La Lorraine pourrait ainsi prendre une position de leadership national sur cet aspect scientifique et technique.
4) Objectifs scientifiques du stage post-doctoral
Dans la version actuelle du site eFLORAsys, La saisie de la composition botanique d’une prairie permet de calculer des indices qu’un expert peut utiliser pour établir un diagnostic agronomique et écologique, sans proposer une interprétation complète. L’objectif du LAE, par la présente demande de stage postdoctoral, est de proposer, à partir d’une approche scientifique, un diagnostic agronomique et écologique (et non plus seulement des éléments pour faire ce diagnostic), en intégrant les progrès scientifiques récemment accomplis au niveau national et international sur cette question.
La question, importante en termes de gestion et d’évaluation, comporte un enjeu scientifique principal : comment intégrer une expertise hétérogène pour produire des outils d’aide à la décision ? L’hétérogénéité de l’expertise signifie ici que la nature et l’état des connaissances sur la valeur des prairies sont très variables selon les aspects considérés (valeur écologique, valeur agronomique), selon les types de prairies (il existe de nombreux types de prairie en France et en Lorraine), selon la formalisation des connaissances (informations qualitatives, données quantifiées, modèles mathématiques) et selon le niveau de validation des connaissances (des hypothèses aux connaissances validées par des expérimentations).
Trois disciplines scientifiques sont mobilisées par cette question, ce qui constitue une originalité du programme : les sciences de l’information, l’agronomie et l’écologie. Nous proposons en effet de partir d’une analyse des connaissances agronomiques et écologiques qui seront ensuite agrégées par des méthodes d’intelligence artificielle afin d’obtenir un diagnostic prédictif de la valeur agronomique et écologique de la prairie permanente.
5) Déroulement du projet
Le projet se déroulera en 2 volets.
1- Analyse et enrichissement des connaissances agronomiques et écologiques (6 mois prévus)
A partir d’une analyse bibliographique et de la consultation d’experts du domaine, il s’agira de recenser et de faire une analyse critique a) des critères utilisés pour évaluer la valeur agronomique et écologique des prairies permanentes, et b) des relations établies entre ces critères, l’état de végétation des prairies, les pratiques agricoles et les conditions pédoclimatiques. La relation entre facteurs (pratiques agricoles, sol, climat) – état de végétation – valeurs de la prairie est complexe. Des concepts récents d’écologie fonctionnelle basés sur l’analyse des traits de vie des espèces apportent un nouvel éclairage sur cette relation, et les modèles proposés permettent désormais d’établir des liens quantifiables, notamment pour le niveau de productivité des prairies ou la valeur alimentaire du fourrage produit par les prairies.
Un enrichissement de ces connaissances sera cependant nécessaire, sur les questions de valeur écologique des prairies, et le traitement des bases de données déjà acquises par le LAE permettra de mieux prédire deux aspects de cette valeur : la faculté des prairies à assurer le maintien des populations d’insectes pollinisateurs, et la qualité de conservation des habitats (au sens des habitats d’intérêts communautaires retenus dans la règlementation européenne de type Natura 2000).
Au final, il s’agira de connaitre, pour tous les facteurs déterminant les valeurs des prairies, la nature (quantitative ou qualitative) des relations qu’il est actuellement possible d’établir entre ces valeurs et ces facteurs. S’agissant des relations quantitatives, il sera nécessaire d’évaluer le niveau de précision ou d’incertitude, en vue du volet 2.
L’encadrement de ce volet sera principalement assuré par les deux agro-écologues spécialistes de la prairie permanente au sein du LAE, Sylvain PLANTUREUX et Bernard
AMIAUD. Le volet bénéficiera des acquis (données et concept) du programme CASDAR « Prairies permanentes » (2008-2011) dont le LAE assure la coordination scientifique.
2- Mise en forme et agrégation de règles de décision par technique de logique floue( 6 mois prévus)
En partant du corpus de connaissances identifiées ou produites dans le volet 1, ce volet 2 s’attachera à produire des règles de décision. Ces règles prendront la forme « si .. alors » (exemple : si la prairie est fauchée avant le 1er juin, et si la parcelle est située entre 400 et 800m d’altitude et si …. alors la production de matière sèche annuelle est de x tonnes de MS et alors la richesse floristique et de n espèces et alors … »). Ces règles formaliseront les connaissances issues du volet 1 sous une forme exploitable par l'outil de d'aide à la décision, dont la tâche est de produire un diagnostic en fonction des facteurs observés sur une prairie. Le formalisme retenu doit prendre en compte l'hétérogénéité de l'expertise et notamment permettre de représenter le niveau de validation de chaque règle. De plus, lorsque plusieurs règles s'appliquent à la prairie considérée, le système doit être capable de les agréger de manière à synthétiser des connaissances traduisant des aspects ou des points de vue différents et potentiellement conflictuels.
Un système d'inférence floue, fondé sur des règles de décision utilisant le formalisme de la logique floue, permettra de répondre à ces contraintes et de présenter un diagnostic tenant compte de l'hétérogénéité de l'expertise ayant conduit au diagnostic.
Cette démarche est essentielle mais ne présente pas en soi un caractère innovant. Nous proposons d’y associer des méthodes de fouille de données permettant de confronter les connaissances exprimées par les experts humains aux connaissances extraites à partir de données de terrain. In fine il s’agit d’un travail de recherche dans le domaine des sciences de l’information et des mathématiques, avec une finalité agri-écologique.
L’encadrement de ce volet sera principalement assuré par Jean VILLERD (ingénieur mathématicien LAE) Sylvain PLANTUREUX. Le volet bénéficiera des collaborations encours entre le LAE et le LORIA, unité de l’INRIA avec laquelle le LAE collabore sur la question de l’utilisation des méthodes et concepts d’intelligence artificielle en agro-écologie.
6) Résultats attendus et valorisation
Le premier résultat attendu du travail est la mise en place dans le système eFLORAsys d’un véritable outil de diagnostic agronomique et environnemental, sous la forme d’un système expert. Cet outil permettra aux utilisateurs du site (chercheurs, ingénieurs, techniciens, agriculteurs, étudiants et formateurs) d’évaluer la valeur écologique et agronomique d’une ou d’un ensemble de prairies, mais aussi de simuler l’impact prévisible de changement de pratiques agricoles ou des conditions pédoclimatiques (ex de l’évaluation des effets du changement climatique) sur la valeur des prairies. Il permettra également de trouver des compromis entre valeur agronomique, qui intéresse directement les agriculteurs sur le plan économique, et valeur écologique, qui répond à une demande sociétale et fait l’objet de subventions publiques. Un élément innovant de ce programme est de chercher à produire un diagnostic associé à une estimation de l’incertitude (ou de la certitude) de l’évaluation.
Le stage post-doctoral synthétisera et produira de la connaissance, à la fois dans le domaine agri-écologique et des sciences de l’information. Il est donc prévu de produire deux publications scientifiques, une par domaine, à l’issue du stage post-doctoral. La première publication serait centrée sur la question du diagnostic agro-écologique des prairies, et la deuxième sur les méthodes de production de règles de décision.
Une des applications d’eFLORAsys est la formation initiale et continue, et plusieurs établissements d’enseignement supérieur utilisent actuellement le site (INPL, UHP, AGROPARISTECH, Univ Bordeaux, Univ Rennes, Vetsupagro Lyon-Clermont). Le produit
du stage post-doctoral permettra de conforter cette utilisation, et d’ouvrir plus largement à un public de professionnels agricoles ou de la gestion de l’environnement.
Sur le plan régional (Université de Lorraine et Région Lorraine), eFLORAsys et le projet d’inventaire prairial national qui lui est fortement lié contribuent au rayonnement de la Lorraine sur le plan scientifique et technologique. Le projet d’inventaire prairial national (qui ne fait pas l’objet de la présente demande de stage post-doctoral) a retenu l’intérêt de deux organismes au niveau national : l’INRA (organisme de recherche) et l’Institut de l’Elevage (Institut technique professionnel agricole). Au-delà de la France, eFLORAsys qui est disponible en français et en anglais a été présenté au colloque de la fédération européenne des herbages en aout 2010 à Kiel (D). Cette première présentation à l’échelle européenne a permis d’initier des premières utilisations du système en Allemagne, en Italie, en Pologne et en Suisse ainsi que dans le cadre du programme européen MULTISWARD.
En Lorraine, les utilisateurs potentiels d’eFLORAsys, outre les établissements de recherche et de formation agricole et agronomique, sont les organisations professionnelles agricoles, les PME assurant du conseil agri-environnemental, les 3 parcs naturels régionaux et les organismes en charge de la gestion d’espaces naturels.