mardi 2 juin 2009

Proposition de thèse en comportement animal

ÉMOTIONS, COGNITION ET BIEN-ÊTRE CHEZ LES OVINS :
ACCUMULATION D'ÉMOTIONS ET DÉVELOPPEMENT D'ÉTATS AFFECTIFS DURABLES

Laboratoire d'accueil : INRA UR1213 Herbivores (http://www2.clermont.inra.fr/urh/)
Directeur du laboratoire : Jean-François HOCQUETTE, DR2 INRA
Directeur de thèse : Alain BOISSY, DR2 INRA
Financements : ANR / INRA – Département PHASE
École Doctorale : Sciences de la Vie et de la Santé de l’Université de Clermont-Ferrand
Contacts : A. Boissy (04 73 62 42 98 ; Alain.Boissy@clermont.inra.fr) ou V. Deiss (04 73 62
43 99 ; Veronique.Deiss@clermont.inra.fr) ou secrétariat (04 73 62 41 47)

Date limite de réception des candidatures : 20 Juin 2009
Dossier de candidature : un curriculum vitae et une lettre de motivations montrant l’adéquation de la candidature avec le profil proposé.

Contexte

La question du bien-être de l’animal d’élevage ne se pose que si l’on reconnaît à celui-ci le statut d’être sensible et réactif. Cela revient à considérer que l’animal est capable d’émotions, minimisant ses émotions négatives (peur, frustration…) tout en recherchant celles positives (plaisir…) (Dawkins 2001, Duncan 1996). En plus des émotions qui sont fugaces par définition, il existe des états affectifs persistants qui conditionnent la manière dont l’animal perçoit et réagit à son environnement (Lazarus 1991). Cependant, comme le soulignent Dawkins (2001) et Dantzer (2002), la prise en compte du bien-être animal en élevage s’est généralement limitée aux indicateurs de stress sans pour autant pouvoir les relier à l’existence d'états affectifs. Il est donc nécessaire de passer de la simple description des réactions de l’animal à la compréhension de ses propres états affectifs (Désiré et al 2002, Mendl et Paul 2004). Sur la base de théories développées en psychologie cognitive (Scherer 2001), nous avons pu montrer sur ovins que des processus cognitifs simples sont à l’origine des émotions (Boissy et al 2007). Par ailleurs, des travaux en psychologie montrent combien les émotions peuvent en retour influencer les processus cognitifs (Mendl et al 2001) et ce d’autant plus durablement que l’expérience émotionnelle persiste (Paul et al 2005). Il semble en être de même chez l’animal puisque des travaux sur rongeurs rapportent que des animaux stressés présentent une altération de leurs capacités à évaluer et à prendre des décisions (Harding et al 2004, Pardon et al 2000). Les données sur les animaux d’élevage font cependant défaut. La thèse proposée vise à analyser l’effet d’un stress répété sur la modulation des capacités émotionnelles et cognitives, et à explorer l’efficacité d’une thérapie comportementale pour contrecarrer les effets délétères du stress. L’approche multidisciplinaire (éthologie cognitive, psychophysiologie, neuroendocrinologie, psychopharmacologie) sera réalisée sur les ovins considérés à la fois comme espèce-cible et espèce-modèle.

La thèse s’articule en trois volets.

Le volet 1 consiste à étudier les répercussions immédiates d’une émotion négative sur les fonctions cognitives (jugement, apprentissage et mémoire) de l’animal. Le protocole d’induction d’émotions repose sur le cadre conceptuel (Désiré et al 2002) inspiré des théories de l’évaluation (Scherer 2001). Les biais de jugement seront estimés à partir de l’exposition à des situations ambiguës (Paul et al 2005). La réactivité émotionnelle et les performances cognitives seront évaluées à partir de tests dont certains sont déjà validés. Le cas échéant, une approche psychopharmacologique sera entreprise pour distinguer les composantes émotionnelle et cognitive dans les comportements mesurés en test.

Description du projet de thèse

Cette thèse fait partie intégrante d’un projet financé par l’ANR démarrant à l’automne 2009. Un modèle de stress chronique sera développé dans un premier volet en analysant comment l’accumulation d’émotions négatives (induites par la contention, l’alimentation retardée ou momentanément inaccessible, le changement de parc, etc., tous ces événements étant réalisés de manière imprévisible et/ou incontrôlable) peut modifier de manière durable les fonctions émotionnelles et cognitives. Les conséquences seront étudiées : i) sur la modification des réactions comportementales et physiologiques (axe corticotrope, système neurovégétatif) à des événements soudains et non familiers, ii) sur la persistance de biais cognitifs, et iii) sur l’altération des capacités d’apprentissage et/ou de mémorisation.

Dans un second volet, il s’agira d’explorer si une expérience émotionnelle positive peut atténuer les perturbations émotionnelles et cognitives induites par le stress chronique. Les émotions positives seront induites par la capacité à prédire l’arrivée d’une récompense telle que la distribution d’aliment, l’accès à une litière propre et l’introduction de partenaires de jeu (i.e. « anticipations positives » Keeling et al 2008). A l’issue de la période de traitement, les déficits émotionnels et cognitifs induits par le stress seront évalués à partir des tests comportementaux définis dans le volet 1. L’efficacité du protocole d’anticipations positives pour contrecarrer les effets délétères du stress chronique sera appréciée par comparaison avec les effets d’un traitement pharmacologique aux antidépresseurs appliqué sur d’autres animaux également exposés au modèle de stress chronique.

Environnement scientifique

La partie expérimentale de ce projet sera réalisée au sein de l’équipe URH-ACS, sous la direction d’A. Boissy et en interaction avec V. Deiss (stress à l’abattage et facteurs expérientiels) et I. Veissier (stress en élevage et apprentissage). Le doctorant bénéficiera du support et des compétences des trois ateliers techniques de l’équipe (atelier d’analyse du comportement, atelier de dosages biologiques et atelier d’analyse de l’activité cardiaque). Il disposera également des installations expérimentales de l’unité et du savoir-faire des animaliers particulièrement sensibilisés à l’analyse du comportement animal. En outre, le doctorant bénéficiera de la collaboration avec l’équipe « Comportement Neurobiologie et Adaptation » de l’UMR INRA PRC, Nouzilly, avec l’équipe « Troubles affectifs : des neurosciences fondamentales à la clinique » de l’Unité 930 INSERM de l’Université de Tours (spécialiste des approches psychopharmacologiques des états de stress chronique), et l’équipe « éthologie animale et humaine » de l’UMR CNRS de l’Université de Rennes1. De plus, il sera pleinement intégré au groupe de travail Émotion-Cognition du réseau scientifique INRA Agri-bien être (http://wcentre.tours.inra.fr/BienEtre/accueil.htm). Le doctorant bénéficiera également du rapprochement avec le SLUniversité d’Uppsala (L. Keeling, SUE) qui développe un programme sur l’induction et l’évaluation des émotions positives sur animaux, et avec l’équipe de l’Université de Bristol (M. Mendl et E. Paul, UK) spécialiste des biais cognitifs chez l’homme et les animaux de laboratoire.

Formation et compétences requises pour candidater
Master2 Recherche en éthologie animale
Goût pour le contact avec l’animal, excellentes qualités relationnelles et organisationnelles pour le travail en équipe, compétences avérées pour la communication scientifique orale et écrite, et connaissances souhaitées mais non indispensables en productions animales