jeudi 7 juillet 2011

Sujet de thèse - Sélection sexuelle

Une thèse en Ecologie Comportementale est ouverte au concours à l’Université François Rabelais de Tours (début prévu le 01/10/11). Le sujet s’intitule « Les males choisissent-ils leurs partenaires sexuels ? Cadeau nuptial et choix des mâles envers les femelles ». Le projet s’intègre dans le contexte de la sélection sexuelle et combinera principalement des approches comportementales, évolutives et physiologiques auxquelles s’ajouteront des techniques d’analyses moléculaires et acoustiques. Les expériences se dérouleront au laboratoire (Tours) mais également sur le terrain (Pyrénées Orientales). L’espèce concernée est une sauterelle, Ephippiger diurnus. Pour plus de détails, voir ci-dessous
Les auditions à l’école doctorale « santé, sciences, technologies » auront lieu le 2 septembre à Tours. La pré-sélection des candidats doit se faire dès maintenant. Si vous êtes intéressés, merci de me faire parvenir votre CV détaillé (incluant les notes, mentions et classements de L3, M1 et M2) ainsi qu’une lettre de motivation pour le 18 juillet 2011.

Les mâles choisissent-ils leurs partenaires sexuels ?
CADEAU NUPTIAL ET CHOIX DES MALES ENVERS LES FEMELLES - APPROCHE COMPORTEMENTALE, EVOLUTIVE ET PHYSIOLOGIQUE

• Encadrement : Marlène Goubault (Maitre de conférences) & Michael Greenfield (Professeur, HDR)
• Structure d’accueil : Institut de Recherche sur la Biologie de l’Insecte, IRBI, UMR CNRS 6035, Université François Rabelais de Tours, Parc Grandmont, 37200 Tours. http://irbi.univ-tours.fr/
• Equipe d’accueil : Physiologie et Ecologie Comportementale, groupe : Ecologie Cognitive
• Début de la thèse : 01/10/2011
• Contact : Marlène Goubault, marlene.goubault@univ-tours.fr, tel : 02.47.36.73.49
• Documents à envoyer par email : Lettre de motivation et CV détaillé (incluant les notes, mentions et classements de L3, M1 et M2)

CONTEXTE GENERAL : Classiquement, lors de l’appariement, les mâles entrent en compétition pour l’accès aux femelles et les femelles choisissent leurs partenaires sexuels parmi ces mâles. Cette vision conventionnelle des rôles sexuels serait liée à l’anisogamie : les ovules sont beaucoup plus coûteux à produire que les spermatozoïdes. Les mâles peuvent ainsi produire de nombreux gamètes à moindre coût et le nombre de descendants qu’ils peuvent obtenir serait simplement conditionné par le nombre de femelles qu’ils parviennent à fertiliser. Au contraire, chez de nombreuses espèces animales, le nombre de descendants produit par une femelle augmente peu, voire pas, avec le nombre d’accouplements. Il en résulte que les femelles représentent le sexe rare pour lequel les mâles se « battent » et ces femelles sont sélectives envers leurs partenaires sexuels. Il semble toutefois de plus en plus évident que l’appariement peut être coûteux pour les males, notamment lorsque ceux-ci transfèrent un cadeau nuptial aux femelles. La production de ce cadeau, tel par exemple le spermatophore des orthoptères, étant coûteux en temps et en énergie, les mâles voient leur taux de reproduction potentiel être considérablement réduit. Cette limitation de leur capacité à s’apparier devrait engendrer une certaine sélectivité des mâles envers leurs partenaires sexuels. Si les choix des mâles par les femelles ont fait l’objet de nombreuses études théoriques et empiriques, le choix des femelles par les mâles (male mate choice) a été bien moins étudié tant concernant les mécanismes proximaux qu’ultimes. Ce projet de thèse s’intègre dans ce contexte général où il ne s’agit pas seulement d’un sexe qui est sélectif, mais des deux. Ce choix mutuel des partenaires sexuels (mutual mate choice) fait actuellement l’objet d’une recrudescence d’intérêt, notamment sur le plan théorique, avec les conséquences que cela peut avoir concernant l’évolution des soins parentaux, des caractères sexuels secondaires chez les mâles et les femelles et sur les processus cognitifs des deux sexes.
Ici, nous proposons d’étudier les choix des mâles chez une sauterelle, Ephippiger diurnus, chez laquelle les mâles transfèrent aux femelles un large spermatophore (pouvant représenter jusqu’à 40% de leur poids) lors de l’accouplement. Ce travail s’inscrit dans un programme de recherche plus large, développé par l’équipe, qui se situe à l’intersection des domaines de la sélection sexuelle et des sciences cognitives et où les choix des femelles sont étudiés en parallèle.
Chez E. diurnus, le spermatophore est constitué d’une ampulla, contenant les spermatozoïdes, et d’un spermatophylax, composé de glucides, de lipides, de protéines et d’eau, qui est ingéré par les femelles. Après transfert d’un tel cadeau nuptial, les mâles présentent une période réfractaire de 24-48h. Pour attirer leurs partenaires sexuels, les mâles chantent en groupes. Les femelles choisissent alors les mâles sur la base de la qualité de leurs chants (nombre de syllabes, rythme, etc.). Les mâles peuvent alors accepter ou rejeter ces femelles : en situation de disette, les femelles tendent à se battre pour accéder à la source de nourriture que représentent les spermatophores et les mâles deviennent très sélectifs en rejetant les partenaires de moindre qualité. Toutefois, si un tel choix précopulatoire peut être restreint à des conditions extrêmes, nous nous attendons à ce que, de manière générale, les mâles expriment des choix dits cryptiques envers la qualité des femelles. Ces choix cryptiques se traduiraient par une réduction de la taille et/ou de la qualité du spermatophore avec celle du partenaire sexuel. Ceci pourrait permettre aux mâles de réduire leur période réfractaire et de pouvoir se ré-accoupler plus rapidement. Des données préliminaires acquises au laboratoire vont dans ce sens.
Objectifs : Les objectifs principaux de cette thèse seront de définir (1) dans quelle mesure les mâles choisissent leurs partenaires sexuels (choix précopulatoires et/ou cryptiques), (2) sur la base de quels traits des femelles ces choix s’opèrent et enfin (3) il s’agira de déterminer les facteurs intrinsèques (e.g. état physiologique, état reproducteur…) et extrinsèques (e.g. nombre de compétiteurs, sex ratio de la population naturelle,…) aux mâles pouvant influencer ces choix. Préalablement, la valeur adaptive du transfert du spermatophore sera évaluée tant concernant les mâles qui le produisent que les femelles qui le reçoivent.
Ces travaux seront réalisés par des expériences de laboratoire et de terrain en combinant des approches comportementales, acoustiques, physiologiques et moléculaires.

Programme proposé :
1- Rôle du spermatophore – S’agit-il d’un investissement paternel (i.e. les nutriments transférés permettraient une plus grande production de descendants de bonne qualité) ou d’une protection du sperme (i.e. la consommation du cadeau nuptial « occuperait » la femelle et éviterait qu’elle interrompe prématurément le transfert de spermatozoïdes) ? Techniques: Etudes comportementales, quantification des spermatozoïdes (microscopie à fluorescence), tests de paternité (microsatellites).
2- Les mâles choisissent-ils leurs partenaires sexuels ? Et si oui, dans quelle mesure affinent-ils leurs choix ? – Mesure de l’investissement des mâles dans l’appariement (male mating investment) pour différentes qualités de femelles (e.g. taille, âge, statut reproducteur) et différentes conditions des mâles (e.g. état physiologique et reproducteur, présence de compétiteurs). Techniques : Etudes comportementales, quantification des spermato-zoïdes (microscopie à fluorescence), mesure de la qualité du spermatophylax (analyses des glucides, lipides et protéines).
3- Conditions favorisant l’apparition des choix mâles au terrain – Mesure de l’investissement des mâles dans l’appariement en conditions naturelles en fonction de la structure des populations et du sexe-ratio opérationel (i.e. nombre de femelles sexuellement disponibles par rapport au nombre de mâles sexuellement disponibles). Techniques : Etudes comportementales de terrain (Pyrénées Orientales), enregistrements acoustiques, méthodes d’échantillonnage, mesure de la qualité du spermatophylax.

ORIGINALITE DU SUJET : L’originalité de ce sujet sera d’étudier, chez une espèce où l’inversion des rôles sexuels n’est pas totale, les choix fins des mâles envers leurs partenaires sexuels, c’est-à-dire non seulement en termes d’acceptation/rejet des femelles mais également en termes d’investissement dans le cadeau nuptial (i.e. quantité et qualité du spermatophylax) et de sperme transmis. Les conséquences de ces choix sur le succès reproducteur des mâles seront évaluées. Par ailleurs, le coté novateur de ce projet sera de mesurer la fréquence de ces comportements sur le terrain. Ces données sont essentielles pour valider les comportements observés en conditions de laboratoire et déterminer les contraintes ainsi que les facteurs favorisant l’évolution des choix des mâles pour leurs partenaires sexuels. Enfin, cette thèse servira de base à des développements théoriques et sera une étape vers une meilleure compréhension des pressions favorisant l’évolution des caractères sexuels secondaires chez les deux sexes ainsi que les différences de processus cognitifs qui peuvent exister entre males et femelles.

APPORT POUR L’ETUDIANT(E) : Ce projet intégratif propose de combiner une approche évolutive des comportements avec des aspects physiologiques, génétiques et acoustiques. Ceci offrira à l’étudiant(e) l’opportunité d’acquérir des compétences théoriques et empiriques en écologie comportementale mais également des techniques d’analyses des sucres, lipides et protéines, ainsi que des techniques d’analyses moléculaires. Cette thèse offre également une double approche de laboratoire et de terrain.