mercredi 10 mai 2017

Sujet de thèse ouvert au concours de l'ED Sciences et Environnement 304 (Université de Bordeaux)

Impact du réchauffement climatique sur les performances sexuelles des mâles : de l’effet individuel aux conséquences populationnelles
Champs disciplinaires: Biologie évolutive, Ecologie comportementale, Ecophysiologie
Encadrement: Pr. Denis Thiery (UMR INRA Save à Bordeaux) denis.thiery@inra.fr
Dr. Jérôme Moreau (UMR CNRS Biogeosciences à Dijon) jerome.moreau@u-bourgogne.fr
Dr. Philippe Louapre (UMR CNRS Biogeosciences à Dijon) philippe.louapre@u-bourgogne.fr
Détails pratiques: N'hésitez pas à nous contacter en joignant votre CV, une lettre de motivation, un relevé de notes de master (faisant figurer le classement), ainsi que le nom de deux personnes référentes (responsables du master, maîtres de stage...). La date limite de dépôt des candidatures sur le site de l'ED étant fixée au 2 juin 2017, nous vous conseillons vivement de prendre contact avec nous bien en amont. Le détail du sujet de thèse : https://www.adum.fr/as/ed/voirproposition.pl?langue=fr&site=ed_se&matricule_prop=15204 Les modalités de candidature à l'Ecole Doctorale : https://ed-environnements.u-bordeaux.fr/content/download/9216/73899/version/8/file/Candidater.pdf
*************************************************************************************** Contexte scientifique et sociétal: La température globale à la surface de la terre a augmenté de 0,2°C par décennie durant les 30 dernières années et continuera d’augmenter d’ici 2010 pour atteindre 1 à 4°C de plus selon les différents scenarii (Hansen et al. 2006). Le réchauffement climatique actuel est un challenge particulièrement important pour les ectothermes comme les insectes, car leur capacité à tolérer des fluctuations de température est primordiale pour leur développement, leur survie et leur reproduction (Overgaard et Sorensen 2008). Curieusement, les modèles de thermodynamique suggèrent que les ectothermes pourraient bénéficier d’une augmentation de température en les rapprochant de leur optimum physiologique (Deutsch et al 2008, Kingsolver 2009) ; tout en reconnaissant que l’augmentation de l’étendue des températures journalières pourra à terme aboutir à une diminution de leur aptitude phénotypique (Paaijmans et al 2013, Colinet et al 2015). Depuis les années 1990, un nombre croissant d’études se sont intéressées aux conséquences du réchauffement climatique sur les insectes, démontrant ainsi un effet direct et rapide sur leurs phénologies et leurs aires de distribution (Menéndez 2007). On observe ainsi un raccourcissement de la durée de développement, une augmentation de la période de vol, un voltinisme croissant, ainsi qu’une remontée des aires de distribution vers le nord et une contraction au sud.
Problématique et objectif général de la thèse: Les insectes phytophages pourtant la cause de 20 à 50% de la perte des récoltes à l’échelle mondiale, et la capacité de reproduction de ces ravageurs est un des éléments qui détermine l’intensité de la pression qu’ils exercent sur les cultures. Une connaissance fine de l’écologie des ravageurs, de leur dynamique de population, et de leurs interactions avec les autres niveaux trophiques (plantes hôtes, ennemis naturels…), permet de proposer une analyse rationnelle et objective des risques de dégâts et de l’efficacité potentielle des moyens de traitement développés. Bien qu’il soit couramment admis que la dynamique des populations est majoritairement contrainte par le potentiel reproducteur des femelles (Berger et al 2012), un nombre croissant d’études suggèrent que la capacité des mâles à accéder aux femelles peut jouer un rôle fondamental dans cette dynamique (Kokko et al 2007). Ainsi, les mâles peuvent avoir des effets positifs (e.g au travers du transfert de cadeaux nuptiaux contenant des substances nutritives que les femelles peuvent réinvestir pour augmenter leur fécondité), ou négatifs (e.g en transmettant des maladies, ou en réalisant des accouplements sans transfert de sperme qui diminuent la fertilité des femelles ), qui induisent des variations potentiellement importantes de la dynamique populationnelle (Rankin et Kokko 2007, Wedell et al 2012, Louapre et al 2014). La prise en compte du potentiel reproducteur des mâles s’avère donc comme étant un élément déterminant à considérer s’il l’on veut prédire l’évolution de la dynamique des populations d’insectes phytophages dans le contexte du réchauffement climatique.
En se basant sur ces résultats récents, le projet de thèse ambitionne de déterminer les effets du réchauffement climatique sur la dynamique des populations de l’Eudémis Lobesia botrana, en se focalisant sur l’impact de la température sur la physiologie, le comportement et la phénologie des mâles. Les vers de la grappe, principaux ravageurs des vignobles européens à l’état larvaire, représentent une bonne opportunité pour tester les conséquences possibles du réchauffement climatique sur les performances sexuelles des mâles à l’échelle individuelle, et ses conséquences populationnelles. Ces ravageurs sont présents du sud au nord de l’Europe, évoluant donc dans une large gamme d’environnements thermiques. Par ailleurs, des travaux récents obtenus durant la thèse de Karen Muller (2013-2016) ont montré que la plante hôte sur laquelle se développent les chenilles et l’expérience sexuelle des mâles influencent de manière complexe leur capacité à accéder aux femelles et leur capacité d’insémination de ces dernières (Muller et al. 2015, 2016). Ces deux facteurs modulent par ailleurs fortement la capacité des femelles accouplées à produire une descendance nombreuse et viable. Par exemple, les femelles recevant un spermatophore hautement nutritif produiront plus de descendants que celles recevant un spermatophore de plus faire qualité (Muller et al. 2015, 2016). En améliorant nos connaissances fondamentales sur la reproduction des mâles, ce projet de thèse ambitionne donc de mieux comprendre comment la dynamique des populations de ce ravageur des vignobles pourra évoluer dans les années à venir sous l’effet d’une contrainte thermique croissante, et ainsi pouvoir anticiper les dégâts futurs sur le vignoble.